23/12/2010

Agoraphobie et douance

Voici trois lignes que j'ai prises dans une note du blog de Raymonde Hazan.

"Finalement, nous arrivons à la conclusion, encore à confirmer, que les agoraphobes seraient des surdoués refoulés.

Refoulé : qui ne s’accepte pas, qui lutte pour être comme les autres et évidemment n’y parvient pas, et qui s’acharne dans une «foule-de–RE», recommencer, ressayer, redire, etc…"

Je pense que Raymonde Hazan a raison. Lorsqu'on est surdoué on devient agoraphobe à cause de notre tendance à vouloir être et faire comme les autres et à ne pas y arriver. Cette envie d'être et d'agir comme tout le monde et le fait de ne jamais y parvenir génèrent de grosses angoisses. On se demande pourquoi on est les seuls à être incapables de faire les choses dites simples et courantes.

C'est très angoissant de se dire que même si on met toute notre volonté et toute notre énergie dans cette lutte pour faire et pour être comme les autres, on n'y arrive pas. On se sent alors faible et vulnérable et on laisse les autres nous marcher dessus. On se dit qu'on n'est vraiment pas à la hauteur et qu'il doit vraiment y avoir quelque chose de grave chez nous pour que rien ne fonctionne "correctement".

On perd peu à peu confiance en nous et on laisse l'angoisse nous envahir. On reste de plus en plus à l'écart puisqu'on n'est pas capable d'être comme les autres. Et plus on reste à l'écart, plus on est angoissé à l'idée de retourner dans un groupe. L'anxiété s'installe alors et nous devenons agoraphobes.

Si l'on regarde mon parcours, j'ai essayé de tout faire comme les autres: Avoir beaucoup d'amis, aimer l'école, passer mon bac, aller à l'université, trouver un emploi, travailler, etc...

J'ai eu beaucoup de peine lors de mes années de gymnase (lycée), parce que j'avais beaucoup de difficulté à comprendre comment les autres faisaient. Cela me perturbait tellement de ne pas arriver à me comporter comme eux que j'ai fini par les éviter. On m'appelait la fille mystère ou le fantôme, tellement j'évitais les groupes. J'avais un ami, un surdoué je pense, avec qui je pouvais parler. Les profs le prenaient pour un guignol et je pense que faire le clown était sa façon à lui de gérer le stress et les autres.

Je n'ai pas réussi à gérer les autres et le stress. Je voulais tellement être comme mes camarades de classe, qui avaient de bonnes techniques pour apprendre leurs cours et qui semblaient ne pas être stressés par leur avenir.

L'avenir m'angoissait et je ne comprenais pas pourquoi j'étais incapable de vivre au jour le jour comme mes camarades le faisaient si bien.

Je luttais pour être comme eux et je n'y arrivais pas ce qui augmentait encore mon anxiété qui était déjà alimentée par la peur de l'avenir.

A 18 ans, j'étais une boule de stress et d'angoisse générée par cette incapacité à être comme les autres.

Je pense que la pédopsychologue, ma mère et mes profs avaient remarqué que je n'étais pas comme les autres, malheureusement, ils ont fait un très mauvais choix pour m'aider à rentrer dans le moule, ils m'ont poussée dans l'enfer de la psychiatrie.

Je ne savais pas à l'époque que mon incapacité à être comme les autres venait de ma différence, de ma douance.

Maintenant que je sais qui je suis, je sais que je ne pourrai jamais être comme tout le monde. Et cette connaissance de ma différence change tout en matière d'anxiété, d'attaque de panique et d'agoraphobie.

Je ne cherche plus à être comme mon entourage voudrait que je sois, je ne cherche plus à coller aux standards ou encore à être comme tout le monde. Je reprends petit à petit confiance en moi en acceptant qui je suis.

En acceptant ainsi ma différence et mon mode de fonctionnement, j'ai fait reculer l'angoisse.

A mon avis, Raymonde Hazan a en partie raison quand elle dit que les agoraphobes sont des surdoués refoulés. Je pense que ce serait plus juste de dire que les surdoués refoulés deviennent agoraphobes, car tous les agoraphobes ne sont pas des surdoués refoulés. Par contre, je suis certaine que tous les agoraphobes sont des êtres qui refoulent leur vrai moi pour essayer de coller au moule.

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Commentaires

Bonsoir,

je viens de lire toute votre histoire et je dois dire que je suis particulièrement sensible à la force et la volonté que vous êtes parvenue à déployer pour vous sortir de la dépendance aux psychotropes...je vous remercie de partager aussi simplement votre expérience.
je me permets de vous écrire car parvenue à la fin de votre récit, j'ai compris la chance que j'ai eue: j'ai été diagnostiquée haut potentiel en juin 2009. Et comprendre que j'étais tout simplement différente m'a beaucoup aidée moi aussi. J'ai 21 ans, je vis en belgique et je fais des études en Philosophie à l'université.
j'ai été diagnostiquée haut potentiel, désolée de le dire, par un psychiatre spécialiste dans le domaine... Malheureusement, j'ai fait sa rencontre car ayant vécu baucoup de traumatismes, j'ai développé vers 19 ans un état de stress post-traumatique dont les attaques de panique et les angoisses étaient insoutenables. pensant de plus en plus me suicider, j'ai été consulter ce psychiatre qui me suit très régulièrement depuis deux ans maintenant. Contre mon gré mais voyant aussi que la situation se dégradait de plus en plus, je fus forcée de prendre de la paroxetine. Je suis aujourd'hui encore ce traitement et j'ai très peur de ne pas pouvoir vivre sans très bientôt...
Etre haut potentiel et je l'apprends de plus en plus, est difficile à vivre car c'est une différence fondamentale. J'ai surtout beaucoup de mal avec mon hypersensibilité à tous les niveaux...
Enfin, je ne sais pas ce que vous en pensez mais j'aimerais pouvoir prendre contact avec vous. Une très grande partie de mon entourage ne comprend pas pourquoi je fonctionne de telle ou telle manière et cela fait beaucoup de bien je pense de pouvoir rencontrer des personnes qui peuvent comprendre ce que signifie être hp...
Encore merci et bonne continuation, je vous souhaite tout le courage du monde

Écrit par : alievtina | 23/01/2011

Bonjour, oh la la la quelle révélation !!! Ou plutôt quelle confirmation de révélation. En effet, je ne sais pas si je suis surdouée ou quoi mais je sais que je n'ai jamais pu faire partie d'un groupe, ni en classe, ni au travail, ... et ce depuis des années, tant et tant que j'ai décidé de travailler seule. Hypersensible, je vois tout, je ressens tout... et j'ai décidé de tout faire en fonction de ma propre personne que j'ai assez rejetée pour pouvoir rentrer dans le moule. J'ai pu arrêter les antidépresseurs du jour au lendemain d'ailleurs. (Je résume là). Quelle solitude j'ai ressenti pendant des années, en essayant de m'accrocher au monde qui m'entourait...depuis que j'ai décidé de mener ma barque seule, de respecter mes goûts et mes envies, de suivre mon instinct (que je refoulais toujours)...la vie est bien plus intéressante pour moi. Traitée de folle depuis que je suis enfant car différente aussi dans cette famille de 5 enfants...j'ai fini par le croire. Interessée par tous les arts, les voyages, la nature, j'ai dû tout refouler...Maintenant, c'est tout bête, mais je peux aller au cinéma sans ressentir d'étouffement, sans prise de panique, j'adore le cinéma et j'ai dû m'en priver à cause de ce mal être ressenti à chaque entrée dans la salle... Je sais que j'ai un potentiel en moi et et si mes études ont été déroutées (j'étais très douée en langues par exemple) par manque d'intérêt à mon égard, voire de méchanceté de la part de ma mère, je pense trouver une voie nouvelle. Je me retrouve femme de ménage, et oui, mais je ne rejette pas ce boulot qui me nourrit... je suis aussi secrétaire, mais je gagne moins, (je veux dire pécunièrement), oui, j'ai râté ma vie, certes, mais elle n'est pas finie...

Écrit par : chenu | 28/02/2011

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