31/08/2010

13. Années 1996-1999

Automne 1996

J'avais 20 ans, je venais d'être déclarée invalide par un psychiatre et je n'avais pas réussi mes examens de première année en biologie. Je prenais tous les matins un antidépresseur depuis deux ans et j'avais déjà tenté par deux fois de ne plus prendre de médication psychiatrique.

Les cours à l'Université avaient repris. Je m'ennuyais, car je n'apprenais rien de nouveau puisque j'avais redoublé. Au bout de trois mois à ce rythme j'abandonnais la fac!

Je n'eus pas le courage de me représenter aux examens de peur d'échouer à nouveau et de ne plus jamais pouvoir m'inscrire dans une branche de la faculté des sciences, car après deux échecs dans une faculté, il n'est plus possible de s'y inscrire.

A l'été 1997, j'étais de nouveau complètement perdue. Je ne savais plus ce que je devais faire. Mais, je ne supportais plus de ne rien faire. Je décidais donc d'aller voir mon conseiller AI pour qu'il me propose une activité.

Je lui dis que je voulais travailler et que comme j'étais à l'AI maintenant, on m'avait conseillé de m'adresser à lui.

Il me dit qu'il allait tout faire pour me trouver une place dans un de leurs ateliers. Je lui transmis mon Curriculum Vitae pour qu'il puisse trouver l'activité la mieux adaptée à mes compétences. Sur mon CV, figuraient mon certificat de fin d'école obligatoire, ma maturité fédérale scientifique et plusieurs de mes petits jobs d'étudiante (saisie dans une base de données, appuis scolaires, caissière dans une station essence, nettoyage de bâtiments, etc...).

Mon conseiller AI me proposa alors un travail de saisie de facturation dans un établissement protégé à Vevey. J'étais contente qu'il m'ait trouvé un travail de saisie, car ce genre de boulot m'avait toujours convenu.

Le lundi suivant, je me rendis dans l'établissement en question. Dès mon arrivée, les éducateurs me dirent que je ne pouvais pas faire de la facturation, car pour pouvoir accéder à un tel poste, il fallait bien connaître l'informatique. Je leur dis que j'avais déjà effectué ce genre de travail, mais ils me dirent que je ne pouvais pas le faire un point c'est tout.

Ils me proposèrent une autre activité. Ce travail consistait à mettre des petits morceaux de bois dans un bout de carton de papier de toilette pour fabriquer des calumets. L'activité en elle-même n'était pas très intéressante, mais là n'était pas le problème.

Le problème s'était d'être considérée comme une arriérée mentale. Les autres personnes qui faisaient ces calumets étaient des trisomiques et des attardés mentaux. Donc, l'éducateur me parlait comme si j'avais trois ans et ne voyait pas que je n'avais pas de problème de retard mental.

Mais, il y avait plus grave. A cette même activité participaient une femme d'une cinquantaine d'années atteinte de sclérose en plaque et un jeune homme d'une vingtaine d'années qui avait perdu l'usage de ses jambes dans un accident de la route. Ces deux personnes étaient là depuis plusieurs semaines et visiblement, elles commençaient à avoir de la peine à supporter d'être traitées comme des attardées.

C'était terrible pour moi de voir ces deux personnes obligées de passer toutes leurs journées dans de telles conditions.

Le jour suivant, les éducateurs me changèrent d'activité. Ils me placèrent dans le service de blanchisserie de l'établissement. Je passais ainsi les jours suivants à trier le linge sale sous les ordres d'une trisomique. Ce fut très dur d'être rabaissée à ce point. J'étais considérée comme quelqu'un de plus limité qu'une personne trisomique...

Je ne tins pas plus de deux semaines. C'était trop humiliant d'être considérée de la sorte.

Je retournais voir mon conseiller AI qui me proposa une autre activité, aussi dans un établissement protégé, mais cette fois à Lausanne.

Dans cet établissement, je devais coller des étiquettes sur des enveloppes. Jusque là pas de problème. Certes, le travail n'était pas intéressant, mais au moins ça occupait. Mais c'était à nouveau la façon dont les éducateurs me traitaient qui était lourde à supporter. A nouveau, ils me parlaient comme à une attardée, car les autres personnes l'étaient.

De plus, je n'étais pas rémunérée et je devais même payer pour accéder à ces postes.

Par conséquent, après avoir essayé de travailler dans ces établissements protégés, je décidais de me débrouiller seule, car visiblement toutes les activités que pourrait me trouver mon conseiller AI allaient ressembler à ça.

Je réfléchis à quelles pourraient être les emplois qui ne demanderaient que peu de temps de formation, mais qui offriraient un bon salaire. Mes réflexions me menèrent tout droit vers les emplois de l'informatique.

Je voulais devenir autonome au plus vite et pouvoir me débarrasser de l'AI. Je savais que pour me libérer de cette étiquette d'handicapée mentale, il fallait que je trouve un emploi qui "en jette", une profession "dans le vent" qui requièrent de bonnes capacités intellectuelles.

Dans les années nonante, les emplois dans le secteur de l'informatique avaient le vent en poupe et les personnes qui y travaillaient étaient considérées comme des personnes intelligentes.

Je m'inscrivis donc à l'école Virgile pour suivre une formation de PC Supporter SIZ. Tout au long de cette période de formation, je complétais mon curriculum vitae en passant diverses certifications CRVMI (Word, Excel, Access et Systèmes d'exploitation Windows 95/98 et NT4).

Ainsi, à la fin de l'année 1999, j'avais obtenues plusieurs certifications CRVMI et ma formation en tant que PC Supporter SIZ avançait bien.

Pendant ces trois ans, j'avais changé deux fois de psychiatre et à chaque nouveau psychiatre, il y avait un nouvel antidépresseur.

A la fin de cette année 1999, j'étais sous Deroxat, mais ça n'était pas mieux que lorsque je prenais de l'Effexor.

J'étais enchaînée à la psychiatrie à cause de ma dépendance aux antidépresseurs, mais je n'avais toujours pas pris conscience de l'existence de cette dépendance.

Je tentais tant bien que mal de me construire une vie professionnelle et affective malgré l'entrave que constituait la psychiatrie dans ma recherche de ces bonheurs.

Cependant, en 1996, j'avais trouvé l'amour auprès du garçon qui m'avait épaulée depuis la dernière année de gymnase et en 1999, j'avais pris mon indépendance en partant de chez ma mère pour vivre dans un studio.

 

à suivre...

 

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Information Wikipédia:

Deroxat (molécule active: paroxétine)

"La paroxétine est devenue l'un des antidépresseurs les plus prescrits en raison de son efficacité apparente dans le traitement de la dépression et d'un spectre de troubles de l'anxiété incluant les attaques de panique et les phobies. Sa prescription est actuellement controversée en raison des procédures en justice à l'encontre du fabricant.

Les effets secondaires de la Paroxétine se manifestent généralement entre la première et la quatrième semaine qui suivent la première prise ; il s'agit de la période pendant laquelle le corps s'adapte au médicament.

La paroxétine peut entraîner quelques-uns, tous ou aucun des effets indésirables décrits ci-après, et la plupart d'entre eux disparaissent ou s'atténuent en continuant le traitement ; cependant certains d'entre-eux peuvent ne pas disparaître pendant la période de traitement.

Par ailleurs, le médicament pourrait engendrer des idées suicidaires chez les adolescents. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration a ordonné la saisie de plusieurs millions de comprimés de Paxil® en 2005. Ces effets secondaires sont souvent discutés mais ils inquiètent la communauté scientifique.

Effets secondaires :

  • Hyponatrémie
  • insomnie
  • Apathie (Apathie est un terme médical désignant un état de fatigue physique ou intellectuelle profond (mais le plus souvent réversible) se caractérisant par une indifférence à l'émotion et aux désirs.)
  • Dilatation de la pupille
  • Nausées
  • Tératogénicité : Ce médicament est déconseillé aux femmes enceintes en raison de possibles anomalies cardiaques
  • Somnolence
  • Maux de tête
  • Modifications du poids et de l'appétit
  • Changements du comportement sexuel
  • Augmentation des sentiments de dépression et d'anxiété (initialement)
  • Sècheresse de la bouche
  • Comportement agressif (surtout chez les enfants)
  • Malformations congénitales possibles
  • Erythème
  • Instabilité psychomotrice / akathisie
  • Démangeaisons
  • Déplétion (Sodium)
  • Sueurs
  • Idées suicidaires
  • Faiblesse musculaire
  • Douleurs musculaires
  • Niveaux d'agression inhabituels
  • Syndrome sérotoninergique

Les notices d'information aux patients sur la Paroxétine semblent varier d'un pays à l'autre."

30/08/2010

12. Eté 1996

Eté 1996

J'avais eu 20 ans quelques mois plutôt. Je n'avais pas réussi mes examens de première année à l'Université et j'avais été déclarée invalide par le psychiatre américain qui me suivait.

Je prenais toujours un antidépresseur (Effexor) quotidiennement et les effets secondaires que je ressentais en le prenant étaient de plus en plus durs à supporter.

J'avais des maux de tête, des maux d'estomac, des nausées, la bouche sèche, des problèmes intestinaux, des problèmes d'équilibre, des vertiges, des tremblements, des problèmes de sommeil, des problèmes de concentration et de mémorisation.

Tous ces effets secondaires que j'avais depuis presque deux ans maintenant, commençaient sérieusement à me gâcher la vie. C'était très fatiguant de supporter ses douleurs à longueur de journée. Je commençais réellement à en avoir marre.

J'en discutais régulièrement avec le psychiatre américain qui me suivait depuis plusieurs mois, mais ce dernier n'avait pas l'intention de changer quoi que ce soit dans la prescription de son traitement. J'avais beau lui dire que je ne ressentais aucune forme d'amélioration de mon humeur et que bien au contraire, depuis que je devais prendre des antidépresseurs, j'étais de plus en plus déprimée, angoissée et nerveuse et que finalement les seuls effets que je ressentais depuis que je prenais ces produits étaient leurs effets secondaires. Rien n'y faisait, il maintenait son traitement tel quel.

Depuis le début de cette année 1996, tous les entretiens que nous avions se résumaient ainsi: Moi je me plaignais de l'inadéquation du traitement médicamenteux et lui insistait sur le fait que je devais continuer à prendre de l'Effexor et que je devais absolument reconnaître que je souffrais d'une maladie grave.

Je fus donc soulagée quand arrivèrent les vacances d'été. Comme il partait en vacances, il y eu plusieurs semaines où je ne dus pas aller à ces entretiens psychothérapeutiques. Cela me permis de réfléchir un peu sur tout ce qui s'était passé depuis que j'étais entrée à l'Université.

En repensant à cette année scolaire écoulée, je me rendis compte que ma vie était de nouveau en train de sombrer. Je me sentais de plus en plus mal depuis que je devais prendre des antidépresseurs et les effets secondaires produits par la prise de ces substances devenaient difficiles à supporter.

Mon moral était en berne depuis que j'avais échoué à mon examen et les effets négatifs que produisaient ces antidépresseurs ne faisaient qu'amplifier cette sensation de mal-être et de décalage qui s'était installée dans ma vie depuis mon passage entre les mains des psychiatres de Nant.

Je n'avais plus aucune confiance en moi et je commençais même à douter de mon intégrité mentale.

Cependant, je ressentais quand même au fond de moi que quelque chose n'allait pas avec cette médication.

En effet, depuis que je devais prendre des médicaments psychiatriques, mon état de santé général n'avait fait que se détérioré. A aucun moment, je n'avais senti d'amélioration, que ce soit sur le plan psychique, sur le plan moral ou sur le plan physique. Bien au contraire, depuis deux ans, j'avais perdu mes capacités de concentration, de mémorisation et d'analyse et je souffrais de douleurs physiques et psychiques constantes (maux de tête, problèmes digestifs, tension musculaire,..., angoisse, dépression,...).

Ayant constaté que ces deux aspects de ma vie (capacités intellectuelles et santé physique) avaient été considérablement affectés depuis que je devais prendre des comprimés quotidiennement, j'en concluais que ça ne pouvait être que l'effet de ces substances sur mon organisme qui avait conduit à la dégradation de ma qualité de vie et non l'effet d'une hypothétique maladie mentale.

Ainsi, à la fin de l'été, je décidais de ne plus consommer ces substances qui étaient en train de ruiner ma vie.

C'était donc la deuxième fois que je tentais de me débarrasser de ces produits. Je savais également que si j'arrivais à m'en libérer, je ne serais plus obligée d'aller consulter un psychiatre. En effet, si j'étais retournée voir un psychiatre l'année précédente, c'était bien à cause d'un problème de médication. C'était donc cette médication qui me liait à la psychiatrie. Sans elle, je serais à nouveau libre.

Dans ma tête, l'équation s'écrivit ainsi: Si je ne prenais plus d'antidépresseurs, je n'aurais plus besoin d'ordonnance, donc je ne serais plus obligée d'aller voir un psychiatre pour les obtenir et ainsi ma liberté me serait rendue.

Ce que je ne savais toujours pas à ce moment-là, c'est que l'on pouvait devenir dépendant à ces substances et qu'on ne s'en libérait pas comme ça. Je ne sus donc pas gérer l'état de manque que l'arrêt provoqua et je me retrouvais rapidement devant le psychiatre qui me sermonna et m'obligea à reprendre mes antidépresseurs.

Après cette deuxième tentative d'arrêt, le psychiatre me convainquit que si j'avais été si mal pendant les quelques semaines que j'avais passées sans prendre d'Effexor, c'était parce que la maladie avait pu reprendre le dessus, qu'elle n'était plus contrôlée par le médicament et que c'était bien la preuve que je souffrais d'une grave dépression. (En fait, plus tard, j'appris que la plupart des psychiatres n'admettant pas l'existence d'une dépendance aux antidépresseurs, interprètent les symptômes dus à un état de manque comme étant une recrudescence de la maladie pour laquelle ils traitent leur patients au départ).

A quelques semaines de la reprise des cours, j'en étais toujours au même point en ce qui concernait les antidépresseurs. J'allais donc devoir m'accommoder de ce traitement et des problèmes quotidiens qu'il occasionnait. J'allais également devoir retourner à ces entretiens psychothérapeutiques stériles à cause de cette médication douteuse qui me liait à mon psychiatre.

Eh oui, ainsi fonctionne la psychiatrie...

 

à suivre...

 

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Information:

(*) "[...] De façon générale, les médecins ont une formation pharmacologique très limitée, et le fonctionnement des psychotropes leur échappe en grande partie. Leur réflexe consiste à attribuer presque systématiquement l'aggravation de l'état du patient à sa personnalité propre, à sa fragilité psychologique, et à écarter d'emblée et définitivement toute responsabilité du médicament qu'ils ont prescrit - ce qui peut se comprendre, tant il est difficile d'admettre qu'un médicament peut rendre malade, et par dessus tout un médicament qu'on a prescrit soi-même. [...]"

source: http://www.benzodiazepines.onlc.fr/

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Information Wikipédia:

Effexor (molécule active: venlafaxine)

Effets secondaires courants:

Les réactions au venlafaxine peuvent différer d'une personne à l'autre. En cas d'effets indésirables, consulter un médecin ou un pharmacien.

  • Perturbation du sommeil
  • Nausées (21-35%)
  • Maux de tête (34%)
  • Apathie
  • Constipation
  • Colon irritable
  • Étourdissements (11-20%)
  • Fatigue
  • Insomnie (15-23%)
  • Vertige
  • Bouche sèche (12-16%)
  • Impuissance
  • Baisse de la libido (14-34%)
  • Transpiration excessive (10-14%)
  • Acouphènes
  • Hypotension orthostatique
  • Rêves vifs/anormaux (3-7%)
  • Actions impulsives
  • Augmentation de la pression sanguine
  • Perte d'appétit(8-20%)
  • Sensations de choc électrique ("Brain zaps" en anglais)
  • Augmentation de l'anxiété en début de traitement
  • Akathisie (Agitation) (3-4%)
  • Pertes de mémoire

 

Effets secondaires moins courants:

  • Arythmie cardiaque
  • Augmentation du cholestérol
  • Flatulence ou maux d'estomac
  • Euphorie
  • Vision anormale
  • Crises de panique
  • Dépression
  • Idées suicidaires
  • Confusion
  • Syndrome malin des neuroleptiques
  • Tremblements
  • Somnolence
  • Réactions allergiques cutanées
  • Saignements externes
  • Endommagement de la moelle osseuse (thrombocytopénie, agranulocytose)
  • Hépatite
  • Pancréatite
  • Convulsions
  • Dyskinésie tardive
  • Difficulté d'avaler
  • Psychose
  • Perte de cheveux
  • Hostilité
  • Activation de manie/hypomanie.
  • Perte de poids (problématique lors du traitement de patients souffrant d'anorexie mentale)
  • Gain de poids (effets incertains, mais problématique lors du traitement de gens atteints de dysmorphophobie).
  • Idées meurtrières
  • Agressivité
  • Dépersonnalisation
  • Hallucinations visuelles
  • Gencives gonflées et/ou qui saignent
  • Mictions fréquentes
  • Vomissements

 

Source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Venlafaxine

 

27/08/2010

11. Printemps 1996

Printemps 1996

Depuis le mois de septembre 1995, je suivais des cours à la faculté des sciences de l'Université de Lausanne. Quelques mois après le début de cette rentrée universitaire, je souffris de l'arrêt de la prise des médicaments qui m'avaient été prescrits à Nant.

Suite à cet état de manque, je me retrouvais à nouveau suivie par un psychiatre, mais cette fois dans un cabinet privé et non plus en clinique psychiatrique.

Ce psychiatre, un américain, me prescrit de l'Effexor à la place des neuroleptiques que je devais prendre depuis mon passage en unité psychiatrique ambulatoire.

Ce psychiatre voulait également me déclarer invalide à 100%. Je ne savais pas si c'était à cause du coût des traitements ou tout simplement parce qu'il considérait réellement que j'étais malade qu'il voulait prendre de telles mesures.

Quoiqu'il en soit, au printemps 1996, année de mes 20 ans, je devenais rentière AI à 100%.

Au mois de juin de cette année-là, allaient avoir lieu les examens clôturant ma première année de cours en biologie à l'Université.

Tout au long de l'année, j'avais assisté avec assiduité aux cours et aux travaux pratiques. Ma camarade de TP et moi, n'avions obtenus que des A à nos rapports de travaux pratiques. Il faut dire qu'un de mes amis qui m'avait déjà aidée à rattraper mon retard en dernière année de gymnase, m'aidait à bien comprendre le contenu du TP avant que l'on doive le réaliser ma "binôme" et moi. Cet ami ne suivait pas des cours à l'Université, mais avait entrepris un cursus en section mécanique à l'EPFL (Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne).

Ainsi nous nous voyions lui et moi pendant les pauses de midi ou après les cours et il m'aidait à préparer la partie théorique des travaux pratiques. Parfois, il m'aidait aussi en mathématique ou en physique. Grâce à ce soutien très précieux, j'arrivais à intégrer le contenu des cours rapidement et ce malgré mes lacunes.

En fait, j'avais accumulé du retard en mathématiques, en physique et en chimie au cours de mes années d'études dans le secondaire.

En effet, depuis la 6ème année scolaire, je n'avais plus accordé beaucoup de temps à l'école, j'avais préféré passer du temps avec une bande de copines. Nous étions cinq filles, toutes dans la même classe. On s'entendait merveilleusement bien et on avait décidé que l'école s'était une perte de temps.

J'avais passé des moments géniaux en compagnie de ces filles, car elles m'acceptaient comme j'étais c'est-à-dire non-fumeuse, non-buveuse et qui ne se droguait pas. Elles, elles buvaient, fumaient et se droguaient, mais elles ne m'obligeaient pas à le faire.

Ensemble, nous faisions les quatre cents coups et notre amitié grandissait à chaque bêtise.

Nous passions tellement de temps entre nous, que nos notes n'ont fait que baisser depuis la 6ème année scolaire. Ainsi, en 9ème année, deux d'entre nous se retrouvèrent en échec scolaire et les trois autres eurent juste la moyenne. J'étais une des deux filles en échec et je redoublais donc en compagnie d'une amie. Parmi les trois autres, deux décidèrent de faire un apprentissage et la dernière poursuivit ses études en allant au gymnase.

Le fait de redoublé m'ennuyait, mais je décidais que c'était l'occasion de rattraper le retard que j'avais accumulé depuis plus de trois ans. J'arrêtais donc les sorties avec ces quatre amies et je me mis à étudier pendant tous mes temps libres.

Ce fut également dans cet état d'esprit que je commençais le gymnase l'année suivante après avoir réussi ma neuvième et dernière année scolaire obligatoire.

J'arrivais donc à l'Université avec encore quelques lacunes, mais qui étaient insignifiantes. Je les comblais facilement grâce à l'aide de cet ami qui m'épaulait depuis l'année précédente (année du bac).

J'avais fourni beaucoup d'efforts depuis quelques années pour rattraper le retard accumulé dans le secondaire et ça avait enfin payé: j'étais tout à fait à niveau et mes camarades de cours en biologie venaient souvent me demander de l'aide quand ils ne comprenaient pas quelque chose.

La seule chose qui me freinait dans mes études, c'était le traitement médicamenteux que je devais prendre et les séances de psychothérapie avec le psychiatre américain.

Une grande partie de mon énergie passait dans mon combat contre ces traitements psychiatriques.

Je menais en fait deux vies en parallèle. Une vie d'étudiante à l'Université et une vie de malade mentale invalide qui devait suivre un traitement psychiatrique. J'essayais de bien cloisonner les deux afin que la psychiatrie ne vienne pas gâcher ma vie estudiantine.

Mais c'était difficile, car dans ces deux mondes diamétralement opposés, les gens avaient une image de moi bien différente. Ainsi, à l'Université, j'étais une étudiante comme toutes les autres, qui assistait avec assiduité aux cours et qui était toujours prête à donner un coup de main. Alors que dans l'univers psychiatrique, j'étais considérée comme une malade mentale qui ne voulait pas voir à quel point elle était atteinte.

C'était très dur d'être considérée comme une moins que rien par le psychiatre qui me suivait. Après chaque entretien, je me sentais incomprise et rabaissée et je me mettais à douter de plus en plus de ma santé mentale.

A chaque rendez-vous, je doutais de plus en plus de mes capacités, ce qui fit que lorsque les examens arrivèrent, je n'avais plus aucune confiance en moi.

Le premier examen, examen de chimie organique, finit d'achever mon capital confiance. Moi qui connaissais par coeur le support de cours de cette branche, je me retrouvais devant des questions qui n'avaient rien à voir avec le contenu du cours.

Mes camarades m'avaient dit quelques semaines avant le début des examens, que pour l'examen de chimie organique, il fallait apprendre par coeur les réponses des épreuves des cinq années précédentes. Je m'étais donc procuré ces fameuses épreuves, mais comme leur contenu n'avait rien à voir avec ce que nous avions vu pendant les cours, je me dis qu'ils s'étaient certainement trompés et que l'examen porterait sur le livre que le professeur nous avait indiqué comme support de cours.

J'avais donc appris quasiment par coeur le contenu de ce livre et aucunes des questions de cet examen de chimie organique ne portait sur ce que j'avais révisé.

Le décalage entre ce que le professeur avait enseigné au cours et ce qu'il demandait à l'examen me fit perdre pied.

Je me présentais aux autres examens en étant complètement déboussolée et j'échouais mon année.

Au début de cet été 1996, tout un pan de ma vie venait de s'écrouler.

Tout ce que je voyais alors, c'était que j'étais incapable de réussir quoi que ce soit. J'avais échoué à l'école (échec en 9ème année), au gymnase (anxiété qui m'avait conduite en psychiatrie) et maintenant à l'Université. Je commençais à me dire que peut-être le psychiatre avait raison, que je ne serai jamais normale et que c'était lui qui avait vu juste en me déclarant invalide à 100%.

Peut-être fallait-il que j'accepte que je ne serai jamais comme les autres et que cela venait d'une maladie mentale comme me le disaient les psychiatres depuis deux ans?

 

à suivre...