01/12/2010

25. Résumé et conclusion

Automne 2010

J'ai enfin réussi à vaincre mes angoisses et mon agoraphobie grâce à la méthode de Geert.

Si je reviens sur mon parcours psychiatrique au cours de ces 15 dernières années, voici ce que ça donne:

En 1994, ma famille et une psychologue me poussent dans l'enfer de la psychiatrie suite à un mal-être d'adolescente et à la surcharge de travail que je me suis infligée depuis mon échec en 9ème année scolaire.

Les psychiatres qui me prennent en charge, m'injectent des psychotropes (anxiolytiques/sédatifs, neuroleptiques) contre ma volonté pendant quelques semaines, tout en brisant mes dernières résistances au moyen d'un chantage psychologique et d'humiliations physiques (les packs).

Ils posent un diagnostic lourd - psychotique paranoïaque à tendance schizophrène - à partir de deux tests (le Rorschach* et le TAT**) que m'avait fait passer la psychologue.

Fin de l'année 1994 et début de l'année 1995, je ne suis plus qu'une épave...

De 1995 à 2005, j'erre de psychiatre en psychiatre, cherchant désespérément une solution pour sortir de l'état où je me trouve. Je ne sais pas encore que ce sont les traitements médicamenteux qui me rendent si malade et je ne me rends pas encore compte de la dépendance que mon organisme a développé à ces substances. Pendant ces dix années, d'autres diagnostics sont posés: Dépression grave, narcissisme, maniaco-dépression, ...

De 2005 à 2007, je me rends compte que la médication qui m'a été administrée depuis plus de dix ans est en train de me tuer à petit feu. Je reçois encore un dernier diagnostic, cette fois je suis borderline...

En automne 2007, perplexe quand à la compétence du corps médical et de la psychiatrie en particulier, je décide de m'en affranchir en entamant un sevrage, car je réalise que ce qui m'a toujours liée à eux, c'était ma dépendance à leurs produits (antidépresseurs, neuroleptiques et anxiolytiques).

En juillet 2008, je prends mon dernier comprimé, je suis sevrée.

De juillet 2008 à septembre 2010, je souffre d'un syndrome de sevrage prolongé assez lourd.

Aujourd'hui, je ne prends plus aucun médicament psychiatrique depuis presque deux ans et demi et je me sens enfin mieux.

La seule chose qui me pose problème est de savoir pourquoi le corps médical et la psychiatrie en particulier avaient pu me trouver autant de maladies mentales! Comment peut-on être en même temps psychotique, paranoïaque, schizophrène, maniaco-dépressif, dépressif, narcissique, borderline et j'en passe? Sans compter le fait que si je souffrais réellement de tous ces troubles, comment aurais-je été capable de suivre des études supérieures, de décrocher un baccalauréat scientifique et de poursuivre une formation en informatique?

Comment expliquer le fait également que je n'ai jamais tenter de me suicider malgré le diagnostic de dépression grave qui m'a été collé pendant plus de cinq ans?

J'ai posé ces questions aux derniers psychiatres que j'ai été voir. Ils m'ont répondu que cela n'avait rien à voir! Je leur ai aussi fait part de mon idée sur ce qui pouvait bien me rendre si étrange à leurs yeux et qui pouvait aisément expliquer leur incapacité à trouver un diagnostic qui me convienne sur la longueur.

Je leur ai demandé, si ma différence ne venait pas du fait que je pouvais être une personne dite à haut potentiel. Tout ce qu'ils ont trouvé à répondre et ce sur un ton exaspéré, c'est: "Tous les malades mentaux se prennent pour des génies!"

Cela m'a profondément blessée et j'ai laissé passer cinq ans avant d'oser à nouveau penser à ce "diagnostic".

Au début de l'année 2010, je me suis de plus en plus documentée sur le sujet de la douance. J'ai lu une demie-douzaine de livres traitant des caractériatiques des personnes surdouées.

A la fin du printemps, je me suis décidée à chercher des psychologues spécialistes de la douance, afin de faire un bilan et un test de QI pour déterminer si mes particularités venaient bien de là. J'ai trouvé une psychologue spécialisée dans ce domaine et j'ai pris rendez-vous.

Lors de notre premier entretien au mois d'août 2010, elle m'a dit qu'elle pensait effectivement que c'était cela. Nous avons pris rendez-vous au mois de novembre 2010 pour qu'elle me fasse passer un bilan complet et quelques jours plus tard, elle m'annonçait que j'étais bien une personne surdouée.

Les résultats du bilan ont également montré que toutes ces années passées sous le joug de la psychiatrie m'avaient déstabilisée et profondément meurtrie. Mes résultats en terme de rapidité de traitement, de mémoire, de concentration et d'estime de soi ont été grandement affectés par des années de mauvais traitements psychologique et médicamenteux.

Au travers de mes lectures, je me suis rendue compte qu'il arrivait très fréquemment que des personnes surdouées soient aussi maltraitées par la psychiatrie. La psychiatrie ne reconnaît pas l'existence des personnes dites à haut potentiel.

Ce que remarquent les psychologues spécialistes des surdoués à ce sujet:

Extrait d'un texte écrit par Jeanne Siaud-Facchin (psychologue spécialiste de la douance):

" [...] Les dérives diagnostiques sont trop fréquentes. Elles résultent de la conjonction de plusieurs facteurs: la méconnaissance des caractéristiques psychologiques de l'enfant surdoué, l'absence de formation dans le milieu médical et paramédical, les résistances idéologiques -pourquoi aider et comprendre ceux qui ont plus ?-, le caractère souvent atypique du tableau clinique. Et cela peut aller jusqu'au déni de l'identité de ces enfants et de ces adolescents, de leurs spécificités, mais surtout de leur vécu et de leur souffrance. Il ne faut jamais oublier que tout diagnostic est émis par un soignant en regard d'une norme et de sa propre capacité à accepter, à tolérer, des écarts par rapport à cette norme. L'enfant surdoué est par définition, hors normes. Il a un fonctionnement, une pensée, une affectivité qui déroutent, qui dérangent. En l'absence d'une possibilité de comprendre ce qui fonde ce décalage un enfant ou un adolescent surdoué qui présente des manifestations ou des symptômes de souffrance psychologique peut être rapidement entraîné vers des pathologies qui ne le concernent pas. Il a été en particulier montré que les surdoués montrent dans le test de personnalité de Rorschach, plus connu sous le nom de test des "taches d'encre", des caractéristiques dans les réponses qui s'apparentent à celles produites par les patients schizophrènes. La raison tient à ce qu'un surdoué produit un grand nombre de réponses divergentes, différentes de celles attendues. Et ce non pas en raison d'une pathologie mais parce que la pensée du surdoué est justement caractérisée par une pensée en arborescence qui se démultiplie sur plusieurs axes simultanément et qui quitte rapidement les formes plus consensuelles de la pensée et les idées courantes. Pourtant, en psychiatrie de l'adolescent les confusions diagnostiques entre mode de pensée singulier et mode de pensée pathologique créent des confusions dramatiques pour l'avenir psychologique du surdoué qui en est l'objet. [...]"

Source: www.cogitoz.com

 

Extrait d'un texte écrit par Arielle Adda (psychologue spécialiste de la douance):

" [...] puisque si jeune il est déjà si différent, les parents vont "consulter", en proies à une anxiété qui sera déjà comprise comme le premier symptôme de pathologie.

Puisque le tableau le plus clair est celui décrit par l'école et que les précisions ajoutées par les parents le compliquent et l'obscurcissent au lieu de le clarifier, il ne reste qu'à traquer "l'anormalité" et à s'y attaquer.
Nous nous trouvons là au point de départ du processus qui va entraîner tous les protagonistes dans une série d'actions totalement inefficaces, car fondées sur un malentendu capital.
En effet cet enfant semble un peu différent, mais on va étudier son cas, l'aider à s'adapter, puisqu'il est considéré comme "
hors-norme", ce qui n'est pas très éloigné de "l'anormal".

Je veux pour preuve de cette idée préalable, le déroulement des examens psychologiques subis en générale par ces enfants. Puisqu'ils ont réussi avec succès les tests scolaires et qu'ils sont manifestement intelligents, on ne pratique pas de test de QI. En revanche, on leur fait passer un Rorschach, toujours délicat à manier avec un jeune enfant, et qui devrait seulement, en principe, contribuer à l'établissement d'un diagnostic, dans un protocole plus complet. Le simple fait de se contenter d'un Rorschach, au lieu de recourir à une batterie plus complète de tests, peut être considéré comme l'élément premier du malentendu : le Rorschach suppose souvent une pathologie qu'il convient de mettre au jour, et il arrive qu'une imagination débordante, tout comme une inhibition totale, peuvent être interprétés de façon très négative. [...]"

Source: www.douance.org

***

 

La psychiatrie me fait peur. J'ai peur de son pouvoir et de l'impunité dont elle dispose. Personne ne remet jamais en question les diagnostics que posent les psychiatres. C'est comme si leur parole était parole d'évangile!

Comment une société peut-elle laisser autant de pouvoir à une discipline qui ne se base même pas sur des preuves scientifiques?

Si les scientifiques admettent ne comprendre qu'une toute petite partie du fonctionnement du cerveau, comment les psychiatres peuvent-ils prétendre maîtriser tous les aspects de ce dernier?

Comment une pseudo-science a-t-elle pu prendre autant de place dans nos sociétés?

Des vies entières sont brisées par la psychiatrie depuis des décennies, mais personne ne fait rien. Pourquoi?

 

Fin

 

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Informations:

* Rorschach

** TAT

"Beaucoup d'enfants, d'adolescents et d'adultes doués sont erronément diagnostiqués comme ayant des troubles du comportement, voir des troubles mentaux. On essaie, à coup de médicaments ou de thérapies inutiles, de les faire entrer dans le moule de l'école, de l'entreprise ou de la famille, ou de rendre leur vie ou leur situation plus satisfaisante."

Source: www.douance.be

Définition:

DSM-IV
"«Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders» (4e édition) (Manuel diagnostique et statistique des maladies mentales). Il s'agit d'un système de classification des maladies mentales développé par l'American Psychiatric Association. Pour chaque maladie mentale, on donne une liste de symptômes dont un certain nombre doit être présent pour que le diagnostic s'applique."

Source: http://www.ustboniface.mb.ca/cusb/psy121/guide/frameglo.h...

 

 



26/10/2010

20. Début de sevrage

Septembre 2007

Après treize ans de dépendance aux neuroleptiques, aux antidépresseurs et aux anxiolytiques, je n'en pouvais plus.

Toute ma vie d'adulte s'était résumée à ça et je ne voulais plus vivre si c'était uniquement pour attendre ma prochaine dose.

En 1994, sous la pression de ma famille et le chantage des médecins de l'hôpital psychiatrique de Nant, j'avais accepté d'être aidée parce que le stress et le surmenage dus à mon surinvestissement dans mes études commençaient à trop peser.

Mais au lieu de m'aider, les psychiatres de Nant m'ont forcée à prendre des neuroleptiques et des sédatifs contre ma volonté. Je ne voulais pas avaler ce genre de substance, alors ils me les ont injectées de force jusqu'à ce que j'en devienne dépendante et que je les prenne bien docilement par voie orale.

J'avais 18 ans.

Entre 1994 et 2007, j'avais tenté à plusieurs reprises d'arrêter de prendre ces médicaments, mais ne connaissant pas le fonctionnement de la dépendance à ce genre de substance, je me voyais à chaque fois obligée de reprendre ce traitement.

J'avais demandé à plusieurs psychiatres de m'aider à arrêter de consommer ces produits psychiatriques, mais aucun d'eux n'accéda à ma demande. Ils préfèraient me prescrire un nouveau médicament à chaque fois que la tolérance au médicament précédent apparaissait.

A aucun moment, ces psychiatres n'ont admis que ces produits (antidépresseurs / anxiolytiques / neuroleptiques) pouvaient entraîner une dépendance et/ou une tolérance. Ils préféraient croire que les sensations de manque que je ressentais, ainsi que les effets secondaires lourds et les réactions paradoxales dues à la prise prolongée de ces substances étaient la manifestation de l'aggravation d'une maladie mentale.

J'ai donc pensé pendant treize ans que je souffrais d'une maladie mentale qui s'aggravait, jusqu'à ce que je commence à me renseigner sur les substances que les psychiatres me faisaient prendre depuis 1994.

Ce fût grâce à mes recherches menées en grande partie sur Internet, que je découvris que les médicaments que les psychiatres me prescrivaient pouvaient entraîner tous les phénomènes qui étaient identifiés par eux comme les signes cliniques d'une maladie mentale.

Je m'informais au maximum sur ces produits et je compris enfin ce qui se passait dans ma tête et dans mon corps. Je compris les différents mécanismes qui génèraient la dépendance, la tolérance, l'aggravation des effets secondaires et la manifestation des réactions paradoxales. Et je compris également qu'il ne me serait pas facile de me sevrer seule.

J'entamais mon sevrage en automne 2007, à l'âge de 31 ans.

Je diminuais très lentement les doses de Tranxilium quotidienne pour ne pas trop souffrir du manque.

Avant de commencer mon sevrage je souffrais beaucoup des effets secondaires suivants: maux de tête, transpiration excessive, diahrrée chronique, besoin d'uriner fréquent (toutes les 30 minutes), tension musculaire permanente, prise de poids, sensation d'être en hypoglycémie tout le temps, vertige, fatigue chronique, insomnie, cauchemars, somnolence, allergies cutanés, agoraphobie, ...

Dès que je commençai à diminuer ma quantité de Tranxilium quotidienne, je dus supporter des migraines atroces, une transpiration tellement abondante que je devais me changer au cours de la nuit, un besoin d'uriner fréquent, des diahrrées incessantes, un état grippal permanent, des insomnies et des hypersomnies, ....

Je dus faire face à un retour de l'agoraphobie, de l'anxiété généralisée et de la dépression. Les psychiatres appellent ça l'effet rebond. Ils définissent l'effet rebond comme étant l'augmentation des symptômes déjà présents avant la prise de médicament et avant la dépendance. Sauf que je n'ai jamais eu d'attaque de panique, d'anxiété généralisée ou encore de dépression avant que les psychiatres ne m'obligent à prendre ces produits.

A nouveau, cette manifestation de l'anxiété, ainsi que celles d'autres symptômes de sevrage sont mal connues des psychiatres qui mettent ça sur le compte d'un problème préexistant du patient. Ils considèrent l'apparition de ces symptômes pendant le sevrage comme une réapparition des symptômes préexistants et la nomme effet rebond, alors qu'il s'agit bel et bien de symptômes de sevrage (* voir informations).

C'est donc parce que les psychiatres interprètent les symptômes de sevrage comme étant la réapparition des symptômes préexistants, qu'ils obligent leurs patients à reprendre leur traitement en les convainquant que ces symptômes sont une manifestation d'un problème psychiatrique profond.

Je souffris pendant plusieurs longues semaines de très forts symptômes de sevrage, mais je tins bon et ne repris pas plus de Tranxilium pour palier à l'anxiété généralisée qui avait fait son apparition depuis le début de mon sevrage.

Les premières semaines et les premiers mois de sevrage furent très difficiles à supporter, mais je savais que je devais passer par là pour pouvoir retrouver ma liberté...

 

... à suivre

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Informations

Effet rebond et symptômes de sevrage:

"La liste suivante comprend des symptômes de sevrage rapportés par un nombre suffisamment significatif de personnes pour être considérés en lien avec le sevrage. Peu connus des médecins, ces symptômes sont hélas trop souvent mal interprétés. L'anxiété ou la dépression, qui sont pourtant des symptômes de sevrage à part entière, sont attribués à l'état psychique "préexistant" du patient, de même qu'un certain nombre d'autres symptômes "psychiatriques" (agoraphobie, phobie, dépression, déréalisation, attaques de panique, etc.). De leur côté, les symptômes physiques du sevrage aux benzodiazépines, qu'il soit aigu ou prolongé, font presque toujours l'objet de diagnostics erronés : fibromyalgie, pour les douleurs musculaires ou articulaires, syndrome du côlon irritable pour les troubles gastriques, maladie de Ménière pour expliquer les vertiges et acouphènes, etc."

Source: http://benzodiazepines.onlc.fr/index.php?page=10

 

"la benzodiazépine est souvent prescrite pour lutter contre un état anxieux ou une insomnie transitoire. Il ne fait pas de doute que le produit est efficace dans les premières semaines - pourtant il perd peu à peu toute efficacité, mais si le patient s'avise de l'arrêter, l'anxiété et l'insomnie réapparaissent avec une force toute particulière (le niveau d'anxiété ou d'insomnie symptômes du sevrage excèdant bien souvent leur niveau initial). Comme la réintroduction de la benzodiazépine fait aussitôt disparaître ces symptômes (puisqu'elle comble le manque), le médecin et le patient sont persuadés que c'est non pas le syndrome de sevrage, mais l'état naturel du patient qui est en cause, et qu'il a donc besoin de ce traitement sur le long terme pour pouvoir fonctionner normalement. Au lieu d'être interrompu, le traitement aux benzodiazépines est donc maintenu, alors même que le patient est désormais dépendant - et c'est cette dépendance, essentiellement physique, conjuguée à une mauvaise compréhension du syndrome de sevrage, interprété comme un pur phénomène de "rebond", qui explique que les durées de prescription de benzodiazépines dépassent très fréquemment les durées légales."

Source: http://benzodiazepines.onlc.fr/index.php?page=4

 

 

 

 

06/09/2010

15. Errance 2003-2004

Année 2003

Je prenais quotidiennement des médicaments psychiatriques depuis 1994 et j'avais développé une dépendance à ces substances.

Malheureusement, je n'avais toujours pas pris conscience de l'existence de cette dépendance physique et les médecins m'assuraient depuis neuf ans qu'il n'existait pas de problème de ce genre avec ces produits.

Les différents psychiatres qui m'avaient suivis depuis mon passage à l'unité psychiatrique ambulatoire de la fondation de Nant, m'avaient chaque fois prescrit un traitement médicamenteux différent. Ainsi, depuis neuf ans, j'avais constamment dû changer de psychotropes. J'avais notamment dû prendre du Nozinan, du Melleril, du Tranxilium, de l'Effexor, du Deroxat, du Xanax, du Truxal, du Deanxit, du Risperdal, de l'Haldol...

Et la liste est encore longue....

Depuis cette fameuse année 1994 où ma vie avait basculée dans l'enfer de la psychiatrie à cause d'un banal surmenage lors de ma dernière année de gymnase (=lycée), j'avais de plus en plus de mal à supporter les effets néfastes des traitements médicamenteux que les psychiatres m'obligeaient à suivre.

Depuis 1994, ma vie était gouvernée par la psychiatrie. J'avais bien essayé de reprendre ma liberté vis-à-vis d'elle en tentant par deux fois d'arrêter de prendre des médicaments, mais la dépendance que mon corps avait développé à ces substances ne m'avait pas permis de m'en affranchir.

J'étais complètement prisonnière de la psychiatrie.

J'avais tenté de mener à bien mes projets malgré l'omniprésence de la psychiatrie dans ma vie, mais à chaque fois, cette discipline m'avait fortement freinée dans leur réalisation.

Devoir vivre avec la pléthore d'effets secondaires que produisaient sur moi les psychotropes était très invalidant. Le plus problématique de ces effets néfastes était certainement la dépendance.

Un des autres très gros problèmes engendrés par la prise chronique de ce genre de médicaments était la tolérance aux produits.

En 2004, cela faisait dix ans que j'étais médicamentée et après tant d'années de prises quotidiennes de psychotropes, mon corps avait développé une tolérance à ces substances.

Je prenais du Tranxilium et du Deroxat depuis quelques mois et je commençais à sentir le manque entre deux prises. Selon la prescription du médecin, je devais prendre un comprimé de chaque tous les matins, mais à partir de vingt heures le soir, la sensation de manque se faisait durement sentir.

Je passais des nuits atroces. Les douleurs dues au manque m'empêchaient de dormir et je me levais toujours plus tôt pour prendre "ma dose". Après quelques semaines à ce régime là, je commençais à prendre un deuxième comprimé de Tranxilium le soir pour pouvoir supporter les symptômes de manque.

Cela me soulagea en temps, car je ne ressentis plus l'effet de manque le soir et je pus dormir un peu.

Malheureusement, ce sommeil n'avait rien de réparateur. En effet, plus tard j'appris que la plupart des psychotropes supprimaient une des phases du sommeil. Ainsi, je dormais plus de dix heures par nuit, mais je me réveillais chaque jour encore plus fatiguée que la veille.

En fait, depuis dix ans que j'avalais quotidiennement au moins un médicament psychiatrique, il n'y avait pas un jour où je ne me sois pas sentie épuisée. La suppression d'une phase de sommeil lors de la prise de ces produits avait généré chez moi cette fatigue chronique. Fatigue que les psychiatres avaient bien sûr mise sur le compte de ma soi-disant dépression chronique.

J'avais développé une dépendance et une tolérance aux médicaments prescrits par les psychiatres et en cette année 2004, je n'en pouvais plus. J'étais à bout. Je n'arrivais plus à supporter d'être tombée si bas.

J'avais perdu toute confiance en moi et je me laissais aller. Je n'avais en fait plus la force de me battre pour retrouver une vie sans médicament.

Je ne ressentais pratiquement plus rien. C'était comme si j'avais perdu l'usage de mes cinq sens. La seule sensation que je pouvais encore ressentir, c'était la douleur. J'avais donc commencé à me faire tatouer plus que de raison pour me sentir vivante, car mon corps ne répondais plus qu'à ce type de stimulus. Pour le reste, j'étais comme anesthésiée.

Il faut dire que tout mon corps fonctionnait "de travers" depuis plusieurs années. Par exemple: Je ne pouvais pas me mettre ne serait-ce qu'une minute au soleil sans avoir des maux de tête, des bouffées de chaleur et suer abondamment.

Toutes les nuits, je transpirais énormément et j'avais des crampes.

J'avais également tout le temps faim et je devais souvent me lever la nuit pour aller manger quelque chose.

Je n'avais plus d'équilibre et je tombais souvent.

J'avais aussi des problèmes d'allergie cutanée.

Des problèmes de mémoire étaient bien présents et il m'était devenu totalement impossible de me concentrer.

Je n'arrivais plus à supporter ces souffrances au quotidien, d'autant plus qu'elles n'avaient fait qu'empirer depuis dix ans.

Je voyais aussi mon conjoint continuer son cursus universitaire, alors que moi j'avais dû faire une croix dessus.

En 2004, il terminait son doctorat à l'EPFL, pendant que moi je m'éloignais de plus en plus des chemins de la réussite. Nous avions eu le même parcours jusqu'en 1995 (année du baccalauréat) et dix ans après, la psychiatrie m'avait broyée, tandis que lui décrochait un poste d'enseignant chercheur.

C'était dur de voir mon conjoint pleinement réussir là où j'avais totalement échoué.

Mais ce qui était encore plus dur à accepter, c'était d'être devenue une épave bourrée de médicaments et de ne plus avoir la force de me battre pour me sortir de cet état.

Je n'avais plus aucune estime de moi, je me détestais au point de ne même plus vouloir me battre pour retrouver cette vie que j'avais avant et que j'avais tant aimée.

En fait, j'étais arrivée à la limite de ce que je pouvais encaisser psychiquement et physiquement et je n'avais plus la force de supporter la moindre douleur due à l'effet de manque.

De toute façon à quoi bon lutter, je n'arrivais pas à me débarrasser de ces substances dont les effets secondaires s'aggravaient de jour en jour et mon avenir était fortement compromis si je continuais à prendre ces produits.

Je commençais doucement à baisser les bras et à me dire que je devrais supporter toute ma vie d'être dans cet état. Je ne me voyais plus d'avenir, tant tout était devenu difficile à faire sous l'emprise de ces drogues.

Ainsi en 2004, j'étais sur le point d'abdiquer face à la toute puissante psychiatrie en laissant les psychotropes prendre le contrôle définitif de ma vie...

à suivre...

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Information Wikipédia:

"Le Clorazépate est un médicament de la famille des benzodiazépines. Il est utilisé pour ses propriétés anxiolytiques, anticonvulsivantes et sédatives.

Le Clorazépate est commercialisé sous la marque Tranxène® ou Tranxilium® par les laboratoires Sanofi-Aventis."

Source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Clorazépate

 

Informations:

Tolérance et dépendance aux benzodiazépines:

"L'usage des benzodiazépines peut provoquer l'apparition d'effets secondaires et/ou paradoxaux conduisant souvent à une mauvaise interprétation de l'état de santé du patient, qui implique le maintien d'un traitement inadapté.

Par ailleurs, si cet usage est prolongé, il peut susciter une tolérance de l'organisme ainsi que l'apparition d'une forte dépendance physique. A l'arrêt du traitement, des symptômes de sevrage apparaissent dans un grand nombre de cas, qui sont à nouveau l'objet d'autant de diagnostics erronés pouvant conduire à la reprise du traitement - qui a pourtant déjà signalé son inefficacité, voire sa nocivité.

[...]

La tolérance est l'autre facteur principal de l'aggravation de l'anxiété ou de l'insomnie sous benzodiazépines. La tolérance est le mécanisme suivant lequel le cerveau s'habitue à l'effet du produit, ce qui conduit le patient à augmenter les doses pour obtenir l'effet initial. Contrairement à une idée reçue, et largement répandue par les professionnels de santé qui préfèrent incriminer le patient plutôt que le produit qu'ils prescrivent si largement, le patient n'est pas coupable de ces augmentations - il n'est pas dans une conduite toxicomaniaque mais se retrouve contraint à augmenter les doses pour fonctionner normalement.

La tolérance à l'effet hypnotique (qui induit le sommeil) des benzodiazépines intervient en quelques semaines, de même que la tolérance aux somnifères, ce qui explique que de nombreuses personnes finissent par prendre une boîte entière de Stilnox ou d'Imovane pour trouver le sommeil. La tolérance à l'effet anxiolytique (qui provoque la relaxation) prend plusieurs mois. Il n'existe pas de tolérance à l'effet amnésique des benzodiazépines, ce qui explique que les détériorations cognitives causées par les benzodiazépines, loin de s'atténuer avec le temps, persistent et s'aggravent lorsque le traitement est poursuivi.

Lorsqu'une personne atteint un stade de tolérance au produit, elle se retrouve non seulement contrainte à augmenter les doses - mais bien souvent c'est en pure perte : la benzodiazépine ou le somnifère ont cessé d'être efficaces et le manque ne tarde pas à apparaître. Il n'est donc pas rare qu'un patient souffre de symptômes de sevrage alors même qu'il est sous traitement en raison de l'apparition de la tolérance - mais à nouveau, les médecins interprètent cette anxiété ou cette insomnie comme endogène et nécessitant le maintien du traitement, ou l'introduction de nouveaux psychotropes - alors que le sevrage est la seule solution viable à long terme."

Source: http://www.benzodiazepines.onlc.fr/