26/10/2010

20. Début de sevrage

Septembre 2007

Après treize ans de dépendance aux neuroleptiques, aux antidépresseurs et aux anxiolytiques, je n'en pouvais plus.

Toute ma vie d'adulte s'était résumée à ça et je ne voulais plus vivre si c'était uniquement pour attendre ma prochaine dose.

En 1994, sous la pression de ma famille et le chantage des médecins de l'hôpital psychiatrique de Nant, j'avais accepté d'être aidée parce que le stress et le surmenage dus à mon surinvestissement dans mes études commençaient à trop peser.

Mais au lieu de m'aider, les psychiatres de Nant m'ont forcée à prendre des neuroleptiques et des sédatifs contre ma volonté. Je ne voulais pas avaler ce genre de substance, alors ils me les ont injectées de force jusqu'à ce que j'en devienne dépendante et que je les prenne bien docilement par voie orale.

J'avais 18 ans.

Entre 1994 et 2007, j'avais tenté à plusieurs reprises d'arrêter de prendre ces médicaments, mais ne connaissant pas le fonctionnement de la dépendance à ce genre de substance, je me voyais à chaque fois obligée de reprendre ce traitement.

J'avais demandé à plusieurs psychiatres de m'aider à arrêter de consommer ces produits psychiatriques, mais aucun d'eux n'accéda à ma demande. Ils préfèraient me prescrire un nouveau médicament à chaque fois que la tolérance au médicament précédent apparaissait.

A aucun moment, ces psychiatres n'ont admis que ces produits (antidépresseurs / anxiolytiques / neuroleptiques) pouvaient entraîner une dépendance et/ou une tolérance. Ils préféraient croire que les sensations de manque que je ressentais, ainsi que les effets secondaires lourds et les réactions paradoxales dues à la prise prolongée de ces substances étaient la manifestation de l'aggravation d'une maladie mentale.

J'ai donc pensé pendant treize ans que je souffrais d'une maladie mentale qui s'aggravait, jusqu'à ce que je commence à me renseigner sur les substances que les psychiatres me faisaient prendre depuis 1994.

Ce fût grâce à mes recherches menées en grande partie sur Internet, que je découvris que les médicaments que les psychiatres me prescrivaient pouvaient entraîner tous les phénomènes qui étaient identifiés par eux comme les signes cliniques d'une maladie mentale.

Je m'informais au maximum sur ces produits et je compris enfin ce qui se passait dans ma tête et dans mon corps. Je compris les différents mécanismes qui génèraient la dépendance, la tolérance, l'aggravation des effets secondaires et la manifestation des réactions paradoxales. Et je compris également qu'il ne me serait pas facile de me sevrer seule.

J'entamais mon sevrage en automne 2007, à l'âge de 31 ans.

Je diminuais très lentement les doses de Tranxilium quotidienne pour ne pas trop souffrir du manque.

Avant de commencer mon sevrage je souffrais beaucoup des effets secondaires suivants: maux de tête, transpiration excessive, diahrrée chronique, besoin d'uriner fréquent (toutes les 30 minutes), tension musculaire permanente, prise de poids, sensation d'être en hypoglycémie tout le temps, vertige, fatigue chronique, insomnie, cauchemars, somnolence, allergies cutanés, agoraphobie, ...

Dès que je commençai à diminuer ma quantité de Tranxilium quotidienne, je dus supporter des migraines atroces, une transpiration tellement abondante que je devais me changer au cours de la nuit, un besoin d'uriner fréquent, des diahrrées incessantes, un état grippal permanent, des insomnies et des hypersomnies, ....

Je dus faire face à un retour de l'agoraphobie, de l'anxiété généralisée et de la dépression. Les psychiatres appellent ça l'effet rebond. Ils définissent l'effet rebond comme étant l'augmentation des symptômes déjà présents avant la prise de médicament et avant la dépendance. Sauf que je n'ai jamais eu d'attaque de panique, d'anxiété généralisée ou encore de dépression avant que les psychiatres ne m'obligent à prendre ces produits.

A nouveau, cette manifestation de l'anxiété, ainsi que celles d'autres symptômes de sevrage sont mal connues des psychiatres qui mettent ça sur le compte d'un problème préexistant du patient. Ils considèrent l'apparition de ces symptômes pendant le sevrage comme une réapparition des symptômes préexistants et la nomme effet rebond, alors qu'il s'agit bel et bien de symptômes de sevrage (* voir informations).

C'est donc parce que les psychiatres interprètent les symptômes de sevrage comme étant la réapparition des symptômes préexistants, qu'ils obligent leurs patients à reprendre leur traitement en les convainquant que ces symptômes sont une manifestation d'un problème psychiatrique profond.

Je souffris pendant plusieurs longues semaines de très forts symptômes de sevrage, mais je tins bon et ne repris pas plus de Tranxilium pour palier à l'anxiété généralisée qui avait fait son apparition depuis le début de mon sevrage.

Les premières semaines et les premiers mois de sevrage furent très difficiles à supporter, mais je savais que je devais passer par là pour pouvoir retrouver ma liberté...

 

... à suivre

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Informations

Effet rebond et symptômes de sevrage:

"La liste suivante comprend des symptômes de sevrage rapportés par un nombre suffisamment significatif de personnes pour être considérés en lien avec le sevrage. Peu connus des médecins, ces symptômes sont hélas trop souvent mal interprétés. L'anxiété ou la dépression, qui sont pourtant des symptômes de sevrage à part entière, sont attribués à l'état psychique "préexistant" du patient, de même qu'un certain nombre d'autres symptômes "psychiatriques" (agoraphobie, phobie, dépression, déréalisation, attaques de panique, etc.). De leur côté, les symptômes physiques du sevrage aux benzodiazépines, qu'il soit aigu ou prolongé, font presque toujours l'objet de diagnostics erronés : fibromyalgie, pour les douleurs musculaires ou articulaires, syndrome du côlon irritable pour les troubles gastriques, maladie de Ménière pour expliquer les vertiges et acouphènes, etc."

Source: http://benzodiazepines.onlc.fr/index.php?page=10

 

"la benzodiazépine est souvent prescrite pour lutter contre un état anxieux ou une insomnie transitoire. Il ne fait pas de doute que le produit est efficace dans les premières semaines - pourtant il perd peu à peu toute efficacité, mais si le patient s'avise de l'arrêter, l'anxiété et l'insomnie réapparaissent avec une force toute particulière (le niveau d'anxiété ou d'insomnie symptômes du sevrage excèdant bien souvent leur niveau initial). Comme la réintroduction de la benzodiazépine fait aussitôt disparaître ces symptômes (puisqu'elle comble le manque), le médecin et le patient sont persuadés que c'est non pas le syndrome de sevrage, mais l'état naturel du patient qui est en cause, et qu'il a donc besoin de ce traitement sur le long terme pour pouvoir fonctionner normalement. Au lieu d'être interrompu, le traitement aux benzodiazépines est donc maintenu, alors même que le patient est désormais dépendant - et c'est cette dépendance, essentiellement physique, conjuguée à une mauvaise compréhension du syndrome de sevrage, interprété comme un pur phénomène de "rebond", qui explique que les durées de prescription de benzodiazépines dépassent très fréquemment les durées légales."

Source: http://benzodiazepines.onlc.fr/index.php?page=4

 

 

 

 

19/10/2010

19. "Tu ne vas pas nous faire ça! "

Automne 2007

"Tu ne vas pas nous faire ça? "

Depuis quelques jours ma décision était prise, j'allais me sevrer de ces substances qui ruinaient ma vie depuis treize ans. J'allais me débarrasser de cette dépendance aux anxiolytiques et aux antidépresseurs même si aucun médecin ne souhaitait m'aider.

L'emprise de la psychiatrie sur les treize premières années de ma vie d'adulte devait prendre fin.

Je voulais reprendre ma liberté coûte que coûte.

N'ayant pas trouvé de soutien auprès du corps médical, je tentais d'en obtenir auprès de mes proches. Mais lorsque je leur fis part de ma décision d'arrêter de prendre ces médicaments, mes proches ne furent pas du tout contents. Une des phrases qui résume bien l'avis de ma famille à ce sujet est celle de ma grand-mère:

"Tu ne vas pas nous faire ça ! "

Cette phrase est lourde de sens. Elle montre à quel point mes proches étaient convaincus que je souffrais d'une maladie mentale. A quel point les médecins de l'hôpital psychiatrique de Nant leur avaient fait peur treize ans auparavant et à quel point ils avaient soufferts de me voir aussi mal depuis des années.

Leur attitude face à ma décision de soigner ma dépendance aux médicaments m'attrista, mais en même temps, je savais qu'ils ne me seraient d'aucune aide dans ma démarche, puisqu'ils avaient toujours écouté l'avis des psychiatres plutôt que le mien.

Dans ma famille, on ne remet jamais en cause l'avis des "gens instruits": Un médecin ne se trompe jamais et il est mal venu de le contredire.

En ce mois de septembre 2007, je me retrouvais à nouveau bien seule face à mon envie d'arrêter de prendre mes comprimés de Tranxilium. Seul mon conjoint décida de me soutenir dans ma démarche.

Je coupais donc les ponts d'avec mes proches. Comme ils ne m'invitaient plus aux dîners de famille, ni aux anniversaires, ni aux repas de fêtes depuis plusieurs mois déjà, ce ne fut pas très difficile de les tenir éloignés.

En ce mois de septembre 2007, je me retirais chez moi pour entamer mon sevrage.

Heureusement, j'avais quand même une personne à mes cotés, mon conjoint.

Je diminuais très gentiment ma dose de Tranxilium quotidienne. Je prenais 6 comprimés par jour avant le début de mon sevrage et je ne pouvais pas arrêter d'en prendre du jour au lendemain.

Je passais de 6 à 5 comprimés de Tranxilium et même avec une si petite diminution le manque se fit cruellement sentir....

 

... à suivre

 

 

18. Joyeux Noël

Hiver 2006 - 2007

A la fin de l'année 2006, je prenais jusqu'à 6 comprimés de Tranxilium par jour.

J'étais de plus en plus seule face à ma dépendance aux médicaments psychiatriques.

J'avais tenté au début de cette année de chercher de l'aide auprès d'une psychiatre spécialiste des personnes dites Borderlines, mais cette personne n'avait pas voulu m'aider bien que m'ayant cataloguée Borderline.

Je ne savais plus où trouver de l'aide. Je me tournais à nouveau vers ma médecin généraliste qui me dit que maintenant qu'on m'avait diagnostiquée comme personne Borderline, elle me conseillait d'aller voir un nouveau psychiatre qui avait ouvert un cabinet dans le même immeuble qu'elle.

Je pris mon courage à deux mains et je contactais ce psychiatre. Le contact fût très froid et il me dit qu'il ne pouvait pas me recevoir. Il me donna tout de même le numéro de téléphone de l'un de ses collègues qui était soi-disant aussi bon que lui.

Je téléphonais donc à son collègue psychiatre qui me dit qu'il n'avait pas non plus de place, mais qu'il allait me faire une fleur et me recevoir. Le rendez-vous était pris.

Lors des trois premiers rendez-vous, ce psychiatre me fit signer un tas de papiers: Un premier qui le déchargeait si je me suicidais, un second qui stipulait que je m'engageais à payer toutes les séances, un troisième qui l'autorisait à filmer les scéances et un dernier qui l'autorisait à montrer les vidéos des scéances à ses collègues et à en discuter avec eux.

Je n'avais jamais dû signer de papier auparavant et cela me sembla très bizarre, mais j'étais tellement mal que je signais tous ces papiers, car je savais que c'était le seul moyen d'être suivi par ce psychiatre. Depuis le temps que je fréquentais le milieu psychiatrique, j'avais bien compris que chaque psychiatre avait un protocole à suivre et qu'il n'en démordait pas quoiqu'il arrive.

Puis vint le moment de changer de traitement médicamenteux.

Il me fit passer de 6 comprimés de Tranxilium par jour à 1 comprimé d'un autre médicament psychiatrique.

Je commençais ce traitement quelques jours avant Noël. Ce fût terrible...

Je pris ce comprimé et deux heures plus tard tous mes muscles étaient contractés au maximum, je faisais une crise de tétanie et l'ensemble des muscles de mon corps étaient touchés. J'avais beaucoup de peine à respirer, non pas à cause de l'angoisse, mais parce qu'il m'était devenu pratiquement impossible d'ouvrir les muscles de ma cage thoracique pour inspirer et laisser l'air entrer dans mes poumons.

Je tentais de joindre le psychiatre qui m'avait prescrit ces médicaments, mais il était en vacances.

Je téléphonais ensuite au cabinet de ma généraliste, mais elle aussi était absente.

N'arrivant à joindre aucuns des médecins qui me suivaient, j'attendis dans l'angoisse que l'effet du médicament se dissipe (plus de douze heures après) et je repris du Tranxilium.

Cette fois était la fois de trop pour moi. Je n'avais plus la force de supporter la torture que ces traitements psychiatriques me faisaient endurer.

Je n'avais plus du tout confiance en ces médecins qui n'avaient jamais rien fait pour m'aider, qui n'avaient fait que me rendre de plus en plus malade et dépendante.

Je savais que je ne trouverais jamais d'aide auprès de ces gens.

Je voulais m'affranchir de la psychiatrie, de cette psychiatrie qui m'avait voler ma liberté en me rendant dépendante à ces traitements médicamenteux.

Le seul moyen de ne plus devoir faire appel à des psychiatres était de me sevrer de ces médicaments, car la seule chose qui me liait à ce milieu était cette consommation de psychotropes.

Sachant que j'avais demandé à presque tous les psychiatres que j'avais rencontrés de m'aider à arrêter de prendre ces substances et qu'aucun n'avait jamais abondé dans ce sens, je savais que je devais demander de l'aide ailleurs.

Je me tournais donc vers ma généraliste.

Malheureusement, elle n'eut pas le courage de s'opposer à l'avis de ces collègues. Elle me dit qu'elle ne pouvait pas m'aider à me sevrer, car ça allait contre l'avis des spécialistes. Ainsi même à distance, les psychiatres me mettaient des bâtons dans les roues.

Je lui dis que j'allais me sevrer avec ou sans son aide.

Nous étions au mois de septembre 2007 et j'étais bien décidée à mettre un terme à ma consommation de médicaments psychiatriques, même si je devais le faire seule.

Ma vie n'avait plus de sens depuis 13 ans, depuis que les psychiatres de Nant m'avaient injecté de force ces substances qui maintenant me privaient de liberté et engageaient sérieusement pour pronostic vital.

Je n'avais plus de sensations normales depuis que je prenais ces produits et chaque année les effets négatifs s'amplifiaient.

Ma vie ne se résumait plus qu'à prendre ma dose pour ne pas souffrir de manque et ça, ça n'avait rien d'une existence heureuse et épanouie.

Je me dis qu'il valait mieux mourir en tentant de me sevrer que de vivre encore des années comme cela, en me consumant à petit feu.

En ce début d'automne de l'année 2007, ma décision était prise: Quoi qu'il allait m'en coûter, j'allais me débarrasser de ces substances et de la psychiatrie...

Même si je devais mourir en me sevrant, au moins j'aurais tenté d'échapper à la psychiatrie jusqu'à mon dernier souffle.

 

... à suivre